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IV


Quand elle était jeune fille, insouciante et belle, elle aimait le printemps, la prairie verdoyante, les libres fleurs des champs, les troupes d’oiseaux joyeux, l’image rouge du soleil dans les ruisseaux grondeurs. Elle écoutait le bûcheron sous la futaie, le marinier sur sa barque, le chasseur à la voix sonore, le cavalier au galop, et dans les bruyères, les troupes errantes de bohémiens. — Elle aimait tout ce qui parlait, respirait Liberté !

Et cependant la prison l’attendait, la prison triste et sombre où l’on ne voit plus ni ciel bleu, ni verdure, ni face humaine, ni beauté de physionomie, ni franchise de cœur, la prison où la Tyrannie et la Souffrance surveillent réciproquement leur maigreur.

… Ainsi joue le Destin, le destin homicide ! La Liberté n’est chantée que dans les fers !


Elle s’approchait de ceux que le monde repousse, elle se penchait vers ceux qu’il abaisse, et de ses deux mains s’efforçait de les relever. Elle aimait le pauvre qui fait rougir le riche ; le mendiant que la misère rend oisif comme d’autres l’opulence ; le vieux 365 domestique qui baise avec respect la main qui le déprime ; l’exilé, citoyen du monde ; les orphelins, les ignorants, les travailleurs : tous ceux qui comprennent le droit langage de la Justice.