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jets de sang qui retombent sur mon sein pour m’étouffer. Souvent une main de fer me laboure le flanc gauche ; je me sens précipité, mourant, dans des abîmes sans fond.

Horreur ! des groupes de squelettes et de serpents se tordent ensemble comme autant de Laocoons. Des reptiles immondes sont entourés d’auréoles de gloire ; le ver aux froids anneaux est leur souverain. Ils marchent sur les étoiles, ils nagent dans l’immensité des cieux, ils m’attirent dans les puits aux eaux froides, dans les mares bourbeuses ; ils ouvrent ma fenêtre et m’ordonnent de me précipiter.

Puis le Cauchemar les rassemble sous ses ailes paternelles et les emporte, hurleurs, au milieu du Chaos. Alors mon cœur bat contre ma gorge comme le flot du Vésuve contre la croûte du cratère. Alors le firmament me paraît éclater ainsi qu’un globe de cristal. Je m’éveille en sursaut, et le bienfaisant Sommeil ne couvre plus mes yeux de ses baisers humides.

Je croyais que le Remords seul pouvait torturer de la sorte. Mais je vois que le traître, le lâche, le parjure, l’oisif et l’exploiteur prospèrent. Et que le travail, le saint amour de l’humanité tuent ceux qui les servent avec trop d’empressement.

Hæret lateri lethalis arundo !


Que de fois la Mort m’apparaît ! Elle grince des dents, mord à mes artères, se vautre dans mes