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en efforts désespérés pour faire valoir ses charmes de seconde fraîcheur. La femme mariée se penche tristement sur le bras conjugal. L’époux débonnaire songe aux prochaines émotions du domino glorieux. La demi-vertu tourmente sa prunelle. Le collégien se croit le point de mire du sexe enchanteur. L’officier traîne son grand sabre, arrondit militairement la hanche et cherche un grain de sable où puissent résonner ses éperons brillants. Les hidalgos se promènent par bandes nombreuses, cigarres en bouche, cannes à la main, courant dédaigneusement aux conquêtes vénales.


— Pauvre jeunesse d’Espagne, comme toutes les autres atrophiée de cœur, déprimée d’intelligence ! Elle se croit virile parce qu’elle porte moustaches brunes et visages bronzés. La race du Cid devait-elle donc si misérablement finir ? —


Que de robes traînantes, de fard, de dentelles, de blanches plumes, d’habits bleus à boutons de cuivre ! Que d’éventails gracieusement balancés ! Que de petits pieds serrés comme des plantes précieuses dans un jardin royal ! Que de mains blanches, de cous élancés, de seins tentateurs, de flancs voluptueux ! Que de rires forcés, que de mots inutiles, que de compliments hypocrites appréciés à leur juste valeur ! Pas un pan d’habit qui dépasse les autres, pas une taille de femme qui n’ait été réduite à tours de bras avant d’affronter les regards du public !