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tune dont la rotation donne le vertige, qui élève, abaisse et broie tout ce qu’elle entraîne.

Et puis, qui donc serait assez inepte pour comparer l’homme salarié tuant des animaux qui ne lui ont fait aucun mal à celui qui combat pour son pays opprimé ?

Dans les cirques d’Espagne on prend des leçons d’intérêt mesquin et de cruauté ; on n’y apprend pas le patriotisme et l’ambition sublime. C’est dans ces arènes que les plus braves de l’Ibérie convertirent leur courage en cette fureur impie qu’ils déployèrent dans les dernières guerres civiles.

Ne vous font-ils pas horreur ces soldats qui amputaient des hommes comme le fut Abeilard, qui coupaient des têtes d’enfants, qui fusillaient des femmes, jetaient des vieillards aux chiens et traquaient Mina, Torrejos et Valdès comme des bêtes fauves ? Ne frissonnez-vous pas à la lecture de ces représailles toujours injustes, toujours atroces et toujours renaissantes ? Vous plaît-elle l’Espagne d’Isabelle la grande et de Charles-Quint rétrogradant ainsi vers la barbarie, le carnage ? Et parmi les hommes qui ont fait cette exécrable guerre, en est-il un seul qui n’en demande pardon à son Dieu dans les prières de chaque soir ?

Voilà ce que produisent les jeux du cirque. Le sang appelle le sang. Il est funeste à l’homme de jouer avec la vie dont il ne connaît pas l’essence. Si les exécutions de taureaux sont nécessaires pour entretenir le courage de l’Espagne, alors malheur sur elle ! Jamais la vue d’un spectacle barbare ne