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Que tu en as emporté, Révolution, des plus grands et des plus purs, dans ta robe d’éclairs ! Que tu en as dévoré de cœurs et d’intelligences qui faisaient l’honneur de l’Humanité ! Qu’importe ? Passe sur les hommes à la vie courte, mais poursuis, oh poursuis ton chemin éternel !… Quant à moi, je veux faire ma tâche. Peut-être d’autres s’en acquitteraient-ils mieux ? Je l’ignore ! Mais puisque, seul et premier, je n’ai pas craint d’ouvrir une lutte pénible contre l’Immobilisme et la Nationalité, je la continuerai. Ce qui m’est échu par ma bonne volonté, je le garde. À chaque peine suffit son vouloir.


Dans les terrains incultes, aux confins des déserts, les vents apportent des semences en grand nombre. La plupart germent tout d’abord et semblent promettre une abondante végétation. Mais elles meurent vite sous les feux du soleil, incapables de prospérer loin du sol natal. Plus tard seulement, une petite graine qu’on n’avait pas remarquée, graine patiente, obstinée, de celles qu’on appelle mauvaises, sachant mettre à profit les pluies et les chaleurs, et le temps et la terre, une graine à la vie dure fait éclater sa coque résistante, s’étale sur la dépouille de celles qui l’avaient précédée, s’élève, et couvre de sa fertilité le sable ardent. Ainsi j’ai su prendre racine dans la terre d’exil où les représentants et les chargés d’honneurs se sont rapetissés !