Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/139

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tion, la force, la faiblesse, les qualités, les défauts, l’âge, la beauté, la laideur, la bonté, l’hypocrisie, la lâcheté, le courage, le talent, la simplicité, la ruse, l’activité, la paresse, tout cela se baptise avec 72 justice, esprit et à propos. — Dès qu’un homme public, empereur ou facteur rural, tranche un peu sur le commun des martyrs, on le distingue par une épithète qui passe dans l’usage et dans l’histoire. — Les mauvais hobereaux, les députés dégrossis, les négociants parvenus s’octroient généreusement des titres de noblesse en faisant suivre leurs noms par trop vulgaires de celui de leur village ou de leur lopin de terre. — Observez les relations des amants et des amis, vous verrez que l’affection humaine, quand elle devient intime, se traduit par des désignations différentes de celle que le hasard inflige.


Tout cela prouve que les noms héréditaires ne suffisent plus à nos rapports sociaux et qu’ils ont fait leur temps comme la famille légale dont ils perpétuent les rapines privilégiées.

Le temps est proche où l’autorité ne connaîtra plus les individus que par des noms officiels, inusités dans les affaires et le langage ordinaires. Alors les agents du gouvernement ne seront pas compris quand ils parleront de telle ou telle personne dans leur idiome grotesque, et l’on se moquera d’eux au lieu de faciliter leurs recherches. L’obstination qu’ils mettront dans la pratique de cette coutume ridicule contribuera, comme bien d’autres vexa-