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Quand à mon premier travail, je n’ai pas à me repentir de l’avoir publié. S’il fut déchiré par la censure de la démocratie officielle, ceux qui n’avaient de parti pris pour aucun chef le parcoururent avec intérêt. Au surplus, je ne recherche pas les faveurs de l’opinion. Si j’ai pu être utile aux prolétaires, je ne leur demande d’en être payé ni aujourd’hui au comptant, ni demain avec usure.




Un auteur ne doit jamais oublier qu’il s’adresse au public, intelligence multiface et paresseuse, qui ne juge que par beaucoup de points de comparaison. Il ne doit pas ignorer surtout que pour servir au peuple, il faut ne pas tenir à l’approbation des savants. Dans notre siècle d’imitation, on appelle savant quiconque passe sa vie à charger sa mémoire des idées des autres, à les rééditer et à les réciter à tout propos. Que, pour leur éternelle expiation, les savants soient condamnés à d’éternels concours !

« La langue usuelle suffit presque toujours à quiconque a des idées claires, dit Helvétius ; qui veut instruire et non duper les hommes, doit parler leur langage. »

Je suis las de feuilleter, de compulser, d’extraire, d’opposer auteur à auteur, hypothèse à système, système à philosophie, logique à sophisme. Je ne suis pas savant cependant, et j’en rends grâces au ciel, non pas à l’Université de France, qui a fait tout son possible pour m’empoisonner.