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Je savais tout cela, et devant tant d’obstacles, j’hésitais. Jusqu’au jour où relisant la préface du livre de l’Humanité de Pierre Leroux, j’y trouvai cette grande pensée : « Le doute qui règne aujourd’hui sur les questions fondamentales de la philosophie et de la religion est un supplice si grand et si général que j’aurais pitié d’un homme qui ne saurait pas se mettre au-dessus du sentiment 25 de son œuvre, et que cette mauvaise honte empêcherait de dire ce que son cœur lui dicterait. »

Après avoir lu ces lignes, je remerciai du fond du cœur le philosophe qui les avait écrites, je pris courage et commençai. Huit mois après je publiais sous ce titre : De la révolution dans l’homme et dans la société, ma première étude analogique.

Ce que j’avais prévu m’arriva, et je trouve bon que le lecteur l’apprenne, me souciant peu de garder des ménagements auxquels n’ont à gagner ni la liberté, ni la vérité, ni le peuple qui doit enfin les connaître toutes deux, par lui-même.

La conspiration du silence, la plus odieuse des conspirations, puis, à toute extrémité, la calomnie, la colère et la haine épuisèrent leurs fureurs sur ce recueil d’hérésies et sur son malencontreux auteur. Je n’avais que ce que je méritais ; pourquoi m’avisais-je de garder mon franc parler quand chacun y renonce ? Les hommes politiques de Londres fulminèrent des excommunications terribles ; autour de ma personne et de ma clientèle on établit des cordons sanitaires ; des amis