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tres réputés sages parmi les nations ; qui tourmenta notre père édénique comme elle tourmente chacun de nous ; problème que jamais homme, quelque grand qu’il soit, ne résoudra pour tous, parce que nous différons trop les uns des autres.

L’énigme me paraît si difficile que, pour la deviner, je vais suivre la méthode d’élimination chère aux esprits paresseux. Je ne suis ni ceci, ni ceci, ni ceci encore : donc je dois être cela. Ce sera long. Qu’importe ? Que chacun apprenne par mon exemple à faire son examen de conscience.

288 Qui suis-je — Poète… Non. Je ne viens pas du ciel comme notre illustre poète[1] ; les éclairs ne m’ont pas déposé sur le roc nu ; je n’ai pas brûlé mes cheveux dans les feux des comètes ; la gloire jalouse ne m’a pas souri, et mes pieds touchent le sol de toute la semelle de mes souliers. — Romancier ?… Pas plus. Je mets bien du temps à écrire un tout petit livre, et les œuvres d’Alexandre Dumas remplissent toutes les bibliothèques de l’Europe. — Philosophe ?… Encore moins. Je n’ai ni maître ni disciples. Je prêche le bonheur ; j’aime le bien-être, les femmes, le luxe et les fêtes ; et si je ne mets pas mes idées en pratique, c’est qu’il y a d’excellentes raisons pour cela. Tandis que la gent philosophante, depuis M. V. Cousin jusqu’à MM. Louis Blanc et J. Si-

  1. Nom sous lequel la confrérie démocratique désigne aujourd’hui M. Victor Hugo ; — à tous péchés miséricorde ! — Vraiment les partis sont bien évangéliques, quand ils y trouvent leur intérêt.