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finiment par son caractère grandiose et sombre. Je rêvai toute la nuit de Weishaupt, des Illuminés et des lames de poignard teintes de sang. Pendant toute une semaine je demandai : « Quel est donc ce mystère ? » Mais je n’obtins point de solution. Les Suisses français n’avaient pas le temps de me répondre ; ils n’en savaient sans doute pas plus long que moi. Quant aux Suisses allemands, ils tenaient très visiblement à garder le secret de leurs pratiques ; je m’en rapportai à la réponse du premier que j’interrogeai sur ce sujet : « Il faut une longue Préinitiation pour être instruit de ces choses. »

De sorte que je suis arrivé jusqu’à ce jour sans connaître le mot d’une énigme que j’eusse tant désiré pénétrer et sans consulter à 280 cet égard les livres menteurs. J’ai toujours vécu dans le consolant espoir de la revoir quelque jour. Et je la reverrai.

Je ne puis cependant me refuser la satisfaction de l’interpréter aussi rationnellement que possible. Selon moi, cela veut dire : Que la guerre est parmi les hommes ; — qu’ils se battent et se tuent ; — qu’on les dépouille de leurs vêtements y compris le casque ; — et que leurs âmes s’envolent. — Les vêtements et les attributs extérieurs des hommes morts restent quelque temps en réserve. — La société tourne autour en chantant et parle de ceux qui les ont portés ; — et puis, elle laisse tomber sur leur mémoire le linceul de l’oubli. — Mais les âmes reviennent, chacune