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mendient ! Toi qui leur recommandas de s’aimer les uns les autres, ils t’appellent le Dieu des armées !

Persécution sans fin ! Éternellement l’humanité se renouvelle ; mais éternellement aussi les sociétés dressent des croix pour y clouer les révolutionnaires ! Ô Christ ! la couronne de roses des Chrétiens est plus lourde à ton front que la couronne d’épines des Hébreux.


X. — Je me suis promené la nuit dans les rues de Fribourg ; elles étaient noires et silencieuses. Et j’ai dit : « Il y a là des hommes qui veillent et d’autres qui sommeillent. C’est la Tyrannie soupçonneuse qui tient ouvertes les paupières des premiers ; c’est l’aveugle Servitude qui ferme celles des seconds. »

Je me suis promené le matin, je me suis promené le soir autour des clochers et des murs de la cathédrale, j’ai visité les fortifications, j’ai gravi les montagnes, j’ai sondé les ravins. Et toujours j’ai vu des ombres noires se dessiner à l’horizon. Ces gens-là ne dorment donc jamais !

Allez dans les champs, semez du blé : ils le mangeront. Allez ramasser des raisins dans les vignes : ils boiront le vin. Allez dans les montagnes couper du bois au péril de votre vie : ils se chaufferont avec. Et vous resterez dans la nudité et dans la faim. Les vrais étrangers dans un pays ce devraient être ses maîtres, mais ce ne sont pas ses maîtres.

Oh ! que tu as coûté, Fribourg ! que tu as coûté