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litation à l’ombre d’un exécuté, c’est préjuger que la société a retiré son estime à cet homme, alors qu’il n’y a que les tribunaux qui l’aient déclaré infâme.

Vraiment, je me sens pénétré d’admiration pour la justice séculière qui veut bien accorder la réhabilitation lorsque l’opinion publique et la menace directe la lui arrachent. On doit lui savoir gré d’avouer qu’elle a pu se tromper une fois, elle qui doit rester infaillible, quand même, et immaculée.

Pour avoir le droit de réhabiliter, il faudrait avoir celui de juger. Et qui donc, magistrats, vous a donné ce droit ? Est-ce la force ? Alors, c’est le butin d’un vol que vous gardez. — Est-ce le consentement universel ? Mais le consentement universel à l’esclavage, c’est la dénaturation de l’homme. Et l’homme ne consent jamais à son propre abaissement ; on le lui impose. Car dans tout contrat libre, chaque partie exige des garanties que vous n’avez 243 point accordées au peuple. Et nul n’est tenu d’observer le contrat à la confection duquel il n’a pas eu part. — Est-ce l’occupation première ? Et si la race qui occupait la terre avant vous revenait, lui rendriez-vous la terre ? Et si les magistrats qui jugeaient sous le règne précédent réclamaient leurs sièges, leur rendriez-vous leurs sièges ? Je le répète, ni vous ni d’autres n’avez droit de juger. Homme libre, je n’accepte la sentence de personne, parce qu’elle implique la supériorité de celui qui la rend vis-à-