Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/401

Cette page a été validée par deux contributeurs.

civilisée doit produire la Monstruosité. Que peut-il se former, sinon des monstres, dans les entrailles d’êtres qui souffrent comme nous et qui doublent leur souffrance par le mariage ? La majorité fait endurer la faim et le mépris aux parents, les enfants les vengent plus tard par la soif du sang et la barbarie. Car les deux fléaux se sont développés avec les années ; la faim s’est convertie en soif, et le mépris en cruauté. Exigerait-on, par hasard, des parents que la société fait mourir, qu’ils apprissent à leurs enfants à chérir cette société ? Exigerait-on de ceux à qui l’on a refusé toute instruction, qu’ils donnassent à leurs enfants des leçons de tolérance et de charité ? Des organisations aussi remarquablement féroces que celles de Lacenaire et de Papavoine ont été conçues par la Misère et élevées par la Vengeance ; elles sont les expressions puissantielles de ces couples déshérités mais rebelles qui subissent l’injustice sans l’accepter jamais ; ce sont des instruments de justice. Je suis convaincu qu’on trouverait cela si l’on remontait dans la généalogie des grands assassins.


Je n’accepte pas davantage les distinctions fausses que créent l’hypocrisie, l’ignorance ou la peur. Comme je repousse toute différence entre l’ordre politique et l’ordre social, je ne reconnais aussi qu’une sorte de crimes, qu’ils aient pour causes des motifs politiques ou des motifs particuliers. Si c’est un crime de tuer un homme, c’est aussi bien un crime de tuer un roi ; si c’est un crime de