Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/399

Cette page a été validée par deux contributeurs.

justice des hommes est satisfaite, nous ne savons pas bien si ce ne sont pas des crimes que vous commettez en notre nom. L’opinion publique est contre vous qui faites 231 les duellistes à froid. Et l’opinion publique, dégagée de l’influence des partis, des entraves de la tradition et des impatiences de l’avenir représente l’humanité dans la continuation des temps et dans la confusion des diverses fractions sociales. L’opinion publique se trompe rarement quand les ambitieux ne l’égarent pas. Songez-y.

En remontant à l’origine du mal, nous trouvons qu’il y eut des âges primitifs où les hommes vivaient en paix parce qu’ils étaient libres et que leurs rapports étaient conformes à l’équité. Tous furent également coupables en sortant de cet état, ceux qui confisquèrent les droits naturels des autres, et ceux qui se les laissèrent enlever. Mais les agresseurs furent bien évidemment ceux qui séparèrent le champ qui leur convenait du territoire commun, et qui s’arrogèrent le droit de faire travailler les dépossédés et de les juger selon les lois qu’ils établirent. Ils furent la souche des propriétaires, des gouvernants et des juges d’aujourd’hui. Si ceux-ci ont hérité de leurs privilèges, ils ont aussi hérité des vengeances que ces privilèges suscitent. Abel fut un privilégié. Il succomba par une juste vengeance. Les meurtriers de tous les temps ne sont pas plus coupables que Caïn ; ils se vengent et l’on se venge sur eux. Avec toutes nos prétentions de réformes timides, nous ne sommes