Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/360

Cette page a été validée par deux contributeurs.

lieu de la nature haletante ! L’orage jouait avec ses cheveux, et la tempête battait ses jambes ensanglantées. Droit comme le rocher, il semblait plus puissant qu’Obéron.

Un instant il se demanda si ce n’était pas un crime d’avoir rejeté cet homme à la mort. Et l’archange des tempêtes lui répondit : « Il y a trop de vous deux sur la terre ; il faut que l’un disparaisse, Gessler c’est l’Autriche, et tu es l’Helvétie. Gessler c’est la tyrannie, et tu es la Liberté. Succomberas-tu sous cet homme ? veux-tu que ta femme, tes enfants et ton pays soient chargés de chaînes ? En avant ! pour Dieu, par toi qu’il a choisi, que ta nation soit libre, et qu’elle devienne nombreuse comme les sables de la mer. »

Gloire, gloire à la Liberté dans les cieux. Et paix sur la terre aux hommes qui combattent pour elle !


Justice et Liberté ! L’homme qui croit en vous est fort, encore qu’il ne soit qu’un pauvre chasseur ou un écrivain ignoré. C’est vous qui réparâtes les forces du Libérateur épuisé ; c’est par vous que ses yeux sondèrent les ténèbres, par vous que ses mains trouvèrent des anfractuosités aux flancs glissants de l’horrible Axenberg. Par vous il arriva jusqu’à son sommet, tentative inouïe, prodige de bonheur, d’adresse et de témérité ! Par vous la Suisse fut libre et l’humanité le deviendra ! Qui donc se laisserait aller au découragement lorsque Tell espéra toujours ?