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prices de la nature n’ont pas encore cédé devant le génie de 185 l’homme, l’amour de la terre natale et un profond attachement à la religion de ses pères forme le caractère du Suisse des Waldstætten.

C’est au plus haut des monts, et près de l’aire de l’aigle, que la Liberté aime à fixer son séjour ; mais c’est aussi dans le secret des forêts épaisses que vivent les religions vieillies et les pratiques superstitieuses. Ce fut là que le culte des Druides se réfugia contre le souffle envahissant du christianisme ; c’est aussi là, qu’en plein dix-neuvième siècle, l’intolérance catholique trouve encore des défenseurs dévoués.

Semblables à ces chênes qui grandissent épars dans les aspérités des rochers, les montagnards du Waldstætten sont trapus et robustes ; ils ont l’écorce dure, une organisation à toute épreuve et une extrême ténacité. Si vous les arrachez à leurs montagnes, il les pleurent jusqu’à la mort. Chez eux vous trouverez la loyauté et le courage, mais ne leur demandez pas le progrès. Sauvegarde d’une civilisation dont l’écho lointain ne retentit que faiblement dans leurs collines, ils en savent à peine le nom, et n’en comprennent pas le besoin…

Repose-toi, Waldstætten, souffle, mon beau bateau ; je voudrais ne jamais te quitter. Demain, d’autres hommes s’appuieront sur tes vertes balustrades : puissent-ils se pénétrer aussi de la conscience de leur liberté. À genoux, pèlerin de l’indépendance, puisque sa grande image est effacée de la terre, puisque son arbre vert ne grandit plus