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trinité furieuse qui s’acharne sur nous. Je suivrai le génie des peuples dans leurs travaux, leurs révolutions et leurs fêtes ; et d’aussi près qu’il me sera possible, j’observerai les cérémonies qu’exécutent ces personnages grotesques qu’on appelle rois, législateurs, prêtres et généraux. Celui qui n’a jamais quitté son pays n’acquiert que des connaissances fausses. Rempli de préjugés nationaux, il ne conçoit l’homme que sous un aspect. Le temps et l’espace sont pour lui des expressions vides de sens ; il lui semble impossible que la terre nourrisse des étrangers, qu’elle ait produit des races anciennes, et qu’elle puisse être peuplée un jour par de nouvelles générations. Cependant aucun homme n’est aujourd’hui ce qu’il était hier, ce qu’il sera demain ; les milieux qu’il traverse le modifient sans cesse. Nous avons l’ambition de saisir dans son ensemble le système de l’univers ; d’où nous vient donc cette erreur étrange, de vouloir connaître l’humanité 148 par un seul peuple, grain de sable perdu dans l’immensité du tout.

— Poursuis ton chemin, voyageur !

C’est la connaissance de l’homme, la plus difficile de toutes, qui te pousse à parcourir le monde.


— Où vas-tu, voyageur ?

Tu supportes mal l’esclavage de l’uniforme ; ta main s’arrondit gauchement sur la poignée d’un sabre, et le casque brillant pèse plus à ta tête que les conceptions du travail.

— Je vais combattre pour la Liberté ! Depuis