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d’horreur des monts géants ; sous ma main, la glace des Alpes se liquéfie, et des sources jaillissent au milieu des déserts. 147 Au milieu des ruines d’Herculanum, de Thèbes aux cent portes, de Memphis et de Palmyre, mes pas sont assurés comme ceux des hommes oisifs dans les rues des capitales. Les chacals fuient devant moi. La vérité ne se trouve qu’au milieu des tombeaux.

— Poursuis ton chemin, voyageur !

Déjà le disque de ta vie a fourni la moitié de son cours ; il te reste à accomplir de grandes choses avant de t’endormir dans les bras du long sommeil. C’est la science, mère de tout progrès, qui te pousse à parcourir le monde.


— Où vas-tu, voyageur ?

Jamais la nature ne reçut tes hommages. Jusqu’alors on t’a vu recueilli dans le silence du cabinet, dans les salles des académies et dans les assemblées de la nation.

— C’est vrai. Ma poitrine fatiguée ne saurait respirer l’air qui court sur le sommet des forêts vertes et sur l’arête des vagues. Je n’ai jamais vécu que dans les villes ; il me faut leur atmosphère épaisse et la discorde des foules humaines. D’une grande cité à l’autre rien ne m’arrêtera ; je comparerai les législations et les mœurs. Au sein des ateliers où l’Industrie martèle, je découvrirai les causes de la Misère et de l’Opulence ; dans les prisons, séjours de la souffrance, j’interrogerai sur leur origine le Crime, le Remords et la Vengeance,