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11 août 1849.


RÊVES DE VOYAGE.




Celui qui est sédentaire n’a rien à raconter ;
celui qui reste couché tisse le mensonge.
Le chant de Thrym — Légende d’Islande.


143 Assis au bord du Léman, je rêvais. Mon visage était calme comme la surface des eaux bleues, mais dans mon esprit, les pensées se pressaient aussi nombreuses que les sources froides qui alimentent les abîmes sous-marins.

La nuit était tombée. C’était l’heure où la nature exhale son premier sommeil dans un murmure immense, où les fleurs se penchent, où les oiseaux abritent leurs têtes sous leurs ailes fatiguées. Alors les chiens de garde passent leurs museaux sous les portes des fermes, les chats lascifs s’ébattent sur les toits, la voix du veilleur de nuit rappelle leur devoir aux époux.

Mes yeux jouaient au plus fort avec les deux yeux de la lune, jusqu’à ce qu’un nuage vînt, comme une mantille espagnole, voiler son front. J’entendais la rosée pleurer sur les feuilles mortes ; une barque dessinait ses blanches voiles dans