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gnificences d’un style superbe, et toutes les flammes d’une éloquence grandiose, au service des idées les plus généreuses. Par cette œuvre, si ignorée qu’on peut la regarder comme inédite, Cœurderoy a marqué sa place au premier rang des écrivains qui sont l’honneur d’une littérature.

Il n’a écrit qu’en prose et c’est un grand poète, il possède la puissance d’ironie du Pascal des Provinciales, du Beaumarchais des Mémoires contre les magistrats prévaricateurs, il a l’esprit mordant de Juvénal et la fougue oratoire des tribuns illustres, d’un Mirabeau, d’un Danton.

Cœurderoy appartenait à cette minorité républicaine qui, en France, à la fin du règne de Louis-Philippe et au lendemain de la révolution de 1848, défendit la cause du peuple, prit en main le drapeau des revendications sociales, et protesta, avec une véhémence faite de pitié et de tendresse, pour les pauvres, les sacrifiés, contre les iniquités d’une prétendue civilisation où le faible est écrasé par le fort.

Jeté en exil après le 13 Juin 1849, Cœurderoy connut toutes les souffrances des existences déracinées, toutes les douleurs des proscrits. Il y a des êtres voués au malheur et sur le front desquels la destinée aveugle a écrit le mot fatal : « Tu souffriras ». Cœurderoy fut un de ces êtres. Tout ce que la bonté peut contenir de douleurs,