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tard et par réflexion que j’eusse songé à visiter Rome ou Londres, dont les artistes et les industriels m’avaient raconté tant de merveilles, mais tous dans les mêmes termes, avec les mêmes exclamations d’enthousiasme. Il me semblait que dans l’immense bassin de l’Océan, dans les plaines d’un firmament sans limites, dans des paysages déroulant à perte de vue leurs montagnes, leurs fleuves et leurs vallées, il y avait plus de champ pour la pensée.

82 La nature est assez riche pour satisfaire l’imagination de chacun, quelque variées que soient les impressions qu’on lui demande. Tandis que les découvertes industrielles et les tableaux des grands maîtres ne sont, après tout, que des copies d’harmonies naturelles, plus ou moins ressemblantes, plus ou moins marquées du sceau du génie, mais enfin, des copies. Cela peut être sublime ; sans doute d’innombrables perfections sont réunies ainsi dans un cadre infiniment plus restreint que celui de la nature. Mais ces chefs-d’œuvre sont dus aux impressions d’autres hommes, et ce sont les miennes que je cherche à la source où chacun les trouve.

Il est des esprits avides d’espace, de mouvement et de rêverie, qui ne peuvent comprendre la liberté dans un salon, l’originalité et la science véritable dans une conversation superficielle, des redites à la mode, et des tours de force de mémoire. Ils se persuadent que pour comprendre la nature sous un nouvel aspect, et pour y trouver