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rez l’eau jaunie du Tibre sur les herbes qui renaissent.

La plus jeune et la plus belle se détachera de ses compagnes, et dira : « Fils de l’humanité, si vaillant pendant ta vie, repose-toi de tes fatigues. Nous avons essuyé le sang qui souillait la lame de ton glaive. Jusqu’à ce que tes yeux se r’ouvrent à la douce lumière, nous veillons sur toi. Nous venons te visiter, discrètes comme l’astre des nuits, bienfaisantes comme la rosée. Nous ne troublerons pas ton sommeil. Nous venons voir si tu n’as pas froid, dans cette terre d’Italie que tu cherchais à réchauffer. Nous t’apportons nos manteaux de soie, nos rubans de fiancées, les fleurs et les fruits que nos soins ont fait croître. »

Près de lui vous resterez jusqu’à ce que l’alouette, messagère de l’aurore, salue sa maîtresse du frémissement de ses ailes grises. Car c’est l’heure où les vivants s’éveillent sous le fouet de la Discorde matinale, où les paisibles esprits des morts se rendorment dans leurs tombeaux.

Que la première nation que visitera la République universelle envoie sur les remparts de Rome, aux premiers jours de juin, les premiers qui se relèveront d’entre ses blessés. Qu’ils se fassent indiquer la place où Laviron tomba, qu’ils y déposent une simple pierre, et sur cette pierre, le drapeau des nations.

Point de marbre, point d’urne funéraire, pas d’inscription, pas de croix d’or, de bois ou d’argent. Laissons ces soins puérils à la vanité des