Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/140

Cette page a été validée par deux contributeurs.

me frotterai les yeux, et je m’élancerai au plus épais de la cohue humaine avec des cris de guerre.

À l’heure où le crépuscule cache de son manteau rouge les squelettes des monts, quand les feux-follets voltigent sur les tombeaux, quand le gazon gémit sous les transports des jeunes couples, à cette heure, je repasserai l’emploi de ma journée et je ne compterai pas l’instant où ma pensée, terrassée par le sommeil, aura connu le repos.

Esprit de la Révolution éternelle, ange ou démon, je suis à toi ! Donne à mon bras la rigidité de l’acier, trempe ma langue dans le fiel de l’éternel Serpent qui menaça le Dieu que les puissants adorent, fais mon cœur de bronze et ma pensée d’airain, afin qu’elles parcourent, incombustibles, l’étincelant sillon de tes éclairs.

Pour ta flamme ardente, c’est un chétif bûcher que le corps de l’homme, sujet aux maladies, à la vieillesse prématurée, à la désespérance, à la folie, à la mort ; vase d’argile où le mépris et la haine résonnent comme les autans dans l’antre de la plaintive Écho. Qu’importe ? brûle, brûle ! Bûcher vivant j’activerai ma propre flamme.




JUIN 1849.


61 En avant ! en avant ! Bade s’est affaissée sans combattre. Que l’armée des peuples passe sur son corps, comme sur celui d’un soldat novice. Il