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Pierre du Calvet

Il manquerait de belles pages à nos annales, si nous arrachions celles qu’écrivirent Du Calvet, Murray, Roebuck, Papineau, Nelson, Hindelang, Perrault, McGill, Doutre, Joly, Beaugrand et tant d’autres qui n’avaient pas nos croyances. Cette abstention systématique nécessitera un de ces jours l’exhumation de ces morts sublimes à qui la Patrie reconnaissante doit plus qu’un tardif tribut floral, une mise en valeur de leur vie et de leurs œuvres. En attendant, faisons-leur notre humble salut, tout en regrettant de n’avoir pas pour cela un de ces larges chapeaux à panache que les grands de jadis abaissaient avec un si joli geste devant le courage et la beauté.

Dans le parti de la révolution on retrouve tous les principes du nationalisme, moins la forme doctrinaire, de date assez récente, que lui ont imprimée MM. Trudel et Tardivel. Fournier et Asselin n’ont pas découvert le nationalisme qui est tout entier dans les 92 résolutions de Papineau, Bédard et Morin, mais ils l’ont remis à l’actualité et rendu pimpant, crâne, bravache, déterminé, avec une allure de mousquetaire. Ce fut une résurrection plutôt qu’une création. L’amour du sol était la base de la politique d’antan : « Notre langue, nos institutions, nos lois, » comme l’avait inscrit Bédard à l’entête de son journal Le Canadien. Le clergé et l’État marchaient la main dans la main, mais aucun ne prétendait écraser l’autre, ayant chacun un idéal différent dont la confusion aurait été une pierre d’achoppement à leur action respective. Le premier prêtre assez hardi pour avoir osé dicter des lois à Papineau, à Bourdage, à Réal de Saint-Vallier, à Quesnel, à Bédard, aurait été poliment, mais fermement, renvoyé à son presbytère.

Ce n’est que plus tard, quand les partis se servirent de la religion comme moyen d’arriver que les prêtres furent priés d’entrer dans l’arène, ce dont ils n’eurent pas à se louer, car la période qui suivit la révolution est remplie par l’histoire de leurs luttes avec l’État, dont M. David nous a donné un résumé clair, dans son ouvrage « L’Union des deux Canadas », qui confirme tacitement son livre interdit par la congrégation de l’Index, le seul livre canadien jouissant de cette distinction.