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Papineau

nous un demi-million d’habitants. Nous sommes pourtant à une période critique où toute maladresse compte. Cette déperdition de force pourrait nous être fatale. Papineau comprenait autrement le bien de la nation. Il ne faisait pas grise mine aux étrangers s’il ne leur tendait pas les bras.

Est-il possible de revivre les temps héroïques, qui ont marqué la conquête du Canada par les Canadiens-français ? Aurons-nous de ces hommes sans peur et sans reproche, qui ne comptaient pour rien le sacrifice d’une vie quand le sort de la patrie et l’idée française étaient en jeu ? Il existe une légende déprimante, c’est que le temple de Jérusalem n’a pu être rebâti, symbole de l’impossibilité pour une race de refaire sa fortune, de renaître en splendeur et en beauté, si nous n’avons l’espérance, la foi et l’amour.

Inutile donc de nous attarder à pleurer sur des ruines, de nous épuiser en de stériles jérémiades. Faisons des vœux pour que le souffle puissant de Papineau revienne transformer notre province et régénérer notre nation. Qu’il déblaye la place des débris, des tessons, des statues mutilées ! Qu’il arrive des lointains de l’infini, comme le feu du ciel, pour purifier les cœurs et ranimer la flamme éteinte de l’idéal !

Ayons foi dans l’avenir. Ceux qui ont vu notre patrie chanceler après de longs et sanglants efforts avaient peut-être raison de se décourager, mais nous qui l’avons vue se fortifier et reconstituer son organisme, se replacer sur un pied d’égalité avec les maîtres du pays, nous n’avons pas le droit de nous abandonner à un pessimisme débilitant. Nous voulons et nous devons vivre pour le Canada-français d’abord, pour qu’il garde sa figure d’autrefois, bon enfant et joviale et pour la France notre mère, afin qu’elle trouve ici de nouveaux cœurs, pour l’aimer et la vénérer.

L’opinion se modifie de siècle en siècle et telles passions qui agitent notre temps peuvent réagir sur la manière dont on jugera les questions politiques des siècles passés. La critique de l’œuvre du chef révolutionnaire subira encore des fluctuations dans l’avenir, c’est-à-dire qu’elle se dégagera insensible-