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Papineau


Montréal, 6 février 1838.
Monsieur,

Après nous être efforcés d’apaiser la justice divine par un office expiatoire, par des jeûnes, par des prières publiques, pour tous les crimes commis en ce diocèse, pendant l’odieuse rébellion de l’an passé contre le gouvernement établi dans cette colonie britannique, il convient aussi que nous rendions à la Providence du Seigneur de très humbles actions de grâces, pour la prompte répression d’une révolte si menaçante, pour les armes puissantes ainsi que pour l’énergie de ses fidèles sujets heureusement dépassant en nombre les hommes déloyaux ou égarés, et pour la paix qui maintenant règne dans tout le Bas-Canada. C’est pourquoi, vous annoncerez le dimanche de la Quinquagésime, que le lendemain, 26 du présent mois, sera observé comme jour d’action de grâce publique pour la paix intérieure rendue à cette province, et qu’il sera chanté, pour cet effet, au jour sus-dit, une messe solennelle pro re gravi, suivie du Te Deum avec son oraison et celle pour la reine. Nous vous prescrivons à cette occasion, d’instruire vos peuples sur leurs devoirs envers la puissance civile conformément à la doctrine apostolique.

Cette lettre contredit celle où l’évêque admettait que la presque totalité des citoyens étaient en révolte ouverte contre l’Angleterre. Ces statistiques assez fantaisistes viennent d’une vision Protée qui n’est pas la même avant et après les événements. Il ne faut pas être trop sévère pour le fonctionnaire, à la solde encore du gouvernement impérial. L’intérêt de l’Église, comme celui du gouvernement, tendait à réduire les proportions du mouvement et à lui donner le moins d’importance possible.

Du moment que le mouvement insurrectionnel n’avait pas réussi, il semblait sage de le désavouer. Si nous excusons cette tactique nécessaire pour le bien de la religion et du prélat, nous croyons toutefois que Mgr Lartigue aurait dû soigner la forme de son langage dans cette lettre, dont la teneur lui fut sûrement dictée en haut lieu : qualifier « d’odieuse » la révolte