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Papineau

culée de son mandement qui précéda de quelques jours seulement les premiers troubles à Montréal fait-elle voir avec quel effort sa conscience l’arrache à son patriotisme. Je dois cette juste réparation, et c’est avec un plaisir indicible que je la fais à l’heureuse mémoire de ce grand évêque digne d’être la première souche de l’épiscopat de Montréal, dont ses successeurs se feront toujours gloire de descendre ; à qui j’ai donné plus de sujets réels de se plaindre de moi que je n’en ai eu de me plaindre de lui, quoique mes clameurs aient été parfois si hautes contre lui. »

Comme il faut avoir l’âme délicate et haute pour éprouver un si vif remords de l’ombre d’une faute. L’abbé Chartier avait 71 ans quand il fit cet acte de soumission dont l’opinion ne doit pas lui tenir compte. Il dut retourner aux États-Unis terminer sa carrière tourmentée par les remords d’une conscience timorée. Les spectres des exécutés de 37 le hantaient partout. Il se reprochait leur fin tragique bien plus que les auteurs réels de leur martyre. Le pauvre abbé Chartier pleura une belle action dont tant d’autres plus tard se sont glorifiés et ont tiré un parti avantageux.

Les derniers moments de Mgr Lartigue furent également angoissés. Au contraire de l’abbé Chartier, le prêtre l’avait emporté sur l’homme, mais la nature se vengeait à la dernière heure et reprenait ses droits. Il aurait cru que le devoir accompli devait assurer la paix de sa conscience, il n’en fut rien. Une douleur lancinante et pour laquelle il n’y a pas de panacée le conduisit à la tombe.