CHAPITRE XIV.
LE SOUFFLE DE LA RÉFORME.
Nous savons par l’histoire que Coligny échoua dans sa tentative d’établir une colonie de Huguenots, au Canada. C’était un beau rêve, digne de ce grand patriote, de vouloir que le meilleur, le plus pur sang de la France n’allât pas féconder un sol étranger. Mais, s’il ne put grouper sur un même coin de terre tous ceux que la persécution chassait de leur patrie, il orienta vers le Canada un certain nombre de Huguenots déracinés du sol. Un exode silencieux se dirigea donc sur les bords du Saint-Laurent dès le milieu du dix-septième siècle. Les protestants prirent possession du sol, sans éveiller de défiance. Ils ne bâtirent ni temples, ni chapelles, « Ils adorèrent Dieu en amour et en vérité dans le secret de leur cœur, » comme le leur conseillaient les livres saints, car ils ne voulaient pas attirer l’attention sur eux, ni rééditer ici la triste et sanglante histoire vécue en Europe. Ils se claquemuraient dans leurs maisons, fermaient les contre-vents pour chanter des hymnes et lire la bible en famille. Ils étaient les seuls à posséder les Testaments dont les premières éditions canadiennes ne parurent à Québec, qu’en 1837. L’Évangile avait été le viatique de leur long et pénible voyage, comme il restait la consolation de leur exil. Là, dans le calme reconquis de leur foyer, ils trouvaient bon d’évoquer le voyage du jeune Tobie, le passage de la mer Rouge, la captivité des Juifs dans le pays des Pharaons, la fuite en Égypte. Ils remarquaient quelque analogie