pas être obligé de céder plus tard à la force souvent brutale des choses, lesquelles échappent aux effets des anathèmes.
Les livres de l’Institut canadien circulent toujours. Hospitalisés par l’Institut Fraser, sous leur brave lieutenant, M. de Crèvecœur, ils soutiennent le bon combat contre l’ignorance, selon leur destination. Ce conservateur des livres, sans égal par son dévouement et sa courtoisie, continue l’œuvre commencée par nos pères. Il a servi la France sa patrie en contribuant à assurer la survivance de la langue maternelle à Montréal.
L’évêque s’effraya des tendances révolutionnaires de l’Institut. L’élite semblait avoir changé son fusil d’épaule. Autrefois, l’ennemi c’était l’Angleterre, mais l’ancienne haine s’était muée en un sentiment de bienveillante tolérance. Mgr Bourget crut s’apercevoir que l’antagonisme des libéraux s’était déplacé et visait sourdement son Église. Est-ce exagération de son zèle d’apôtre, aussi ombrageux que la jalousie d’un amant et qui lui faisait prendre au tragique une simple indépendance d’allure, une largeur de vues, une liberté de discussion, auxquelles on n’était pas habitué ? L’évêque fit-il naître par ses préventions un état de choses qu’il redoutait ? Ses soupçons donnèrent-ils un corps à ce qui, jusque-là, n’avait été qu’un vague état d’esprit ?
Quoi qu’il en soit, les membres de l’Institut se crurent injustement persécutés. Les dénonciations dont ils étaient l’objet leur semblaient du parti pris. Ils protestèrent de leurs bonnes intentions envers l’Église et de leur respectueuse soumission, et prétendirent qu’on prenait pour de l’hostilité ce qui n’était qu’un sentiment de tolérance et de bienveillance pour les adeptes de tous les cultes. Les membres catholiques en appelèrent à Rome des allégations de l’évêque, mais avant de recevoir une réponse de la cour romaine, ils apprirent avec stupeur leur condamnation par l’autorité diocésaine, s’appuyant sur un décret du Sacré Collège. Les uns brisèrent avec l’Institut, tandis que les autres tinrent tête à l’orage et aux foudres de l’Église. Toutefois, cette scission fut le commencement de la désagrégation de la Société. Il suffit d’une pierre descellée