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L’Institut Canadien

à son égard. Ils en vinrent lentement à la conclusion que de toutes les races qui se meuvent aujourd’hui sur la machine ronde, la plus active, celle qui pèse le plus fortement sur le monde est la race Anglo-Saxonne, qu’elle semble nécessaire à la destinée de notre planète, à la manière de gros poissons qui mangent le menu fretin. Elle est un des rouages les plus importants de la politique des temps modernes. Le sort de beaucoup de nations est lié au sien. Sans elle, l’Amérique agonisait sous la barbare civilisation espagnole ; sans l’évangile de la liberté qu’elle nous apportait, peu disposée souvent à le mettre en pratique, la découverte de Colomb devenait un fait néfaste dans l’histoire, par le sang et les tortures qu’elle aurait coûtés. Bien des nations pourraient disparaître dont l’anéantissement n’aurait pas l’effet désastreux de celui de la solitaire, égoïste et parfois cruelle Angleterre. On n’allait pas jusqu’à dire qu’on pourrait se passer d’elle dans un avenir plus ou moins lointain. Protectrice intéressée de notre destin, elle s’est trouvée à point pour changer les conditions de notre existence, pour empêcher notre race de disparaître dans le grand tout américain. Étrange peuple où semble s’être amalgamés l’esprit des Hébreux, l’âme de Carthage et la force morale des Romains, perfide, humaine, exterminatrice, impitoyable comme la fatalité, elle semble, tant par ses défauts comme par ses qualités, être la race de domination terrestre par excellence. Les leçons du passé n’étaient pas lettres mortes. Les membres de l’Institut, tout en sympathisant avec les Anglais, se gardaient de leurs entreprises assimilatrices. Ils subissaient la domination anglaise comme une période de transition, mais non pas comme un état définitif, avec l’audacieux espoir de leur libération future. Tout en se défendant d’être absorbés par cette race soi-disant supérieure qui a su s’identifier avec tous les autres peuples, ils étaient disposés à tirer le meilleur parti possible d’une situation difficile. Les Anglais bien nés, qui s’intéressaient au développement intellectuel, étaient traités en alliés. Libéraux, anglais, protestants, français se rencontraient sur le terrain neutre de l’Institut pour aviser au moyen de tirer du ma-