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Papineau

le flot de la mer avait déjà jetés sur nos rivages… » Quelles insinuations perfides ! L’historien sort ici de son impassibilité de rigueur pour prendre le ton d’un sectaire et d’un doctrinaire. Si l’on croit bon de rejeter le pan du manteau de la décence sur les hontes de nos poètes nationaux, pourquoi donc n’en pas user de même envers les étrangers, voire envers les Publicains et les Samaritains pour qui le Christ avait des paroles de mansuétude et de pardon ?…

Nous ferons remarquer en passant qu’un manuel d’histoire du Canada, compulsé par les Frères des Écoles chrétiennes, enseigne que le premier journal du Canada s’appelait : Tant pis, tant mieux. La lanterne de ces messieurs est mal éclairée. On a pris pour une gazette le titre d’un article libelleux, paru dans La Gazette de Fleury Mesplet en 1779.

L’abbé Roy, dans nos Origines littéraires, nous parle du Canadien, du Spectateur, de Montréal. Il commet une omission involontaire, nous le croyons, en oubliant La Quotidienne, le journal frondeur de la période révolutionnaire, publié par Lemaître. Il parut alors que l’insurrection battait son plein avec une intermittence de quatre mois pendant lesquels l’imprimeur propriétaire était en prison. Il fut publié plus tard sous le nom de La Canadienne. Le sentiment britisher de M. Camille Roy l’envoûte jusqu’au point de lui faire passer sous silence ce brave petit journal, qui tirait à bout portant sur les habits rouges et les loyalistes. Lui en voudrait-il d’être né à Montréal, rédigé dans une langue légère, de n’être pas bigot, et de n’avoir pas froid aux yeux ? Il s’exprime avec cette franchise rustique qui donne tant de verdeur et d’accent à son honnête langage. C’est cet esprit de vieille roche comme on en trouve non seulement dans Gaspé, mais dans nos campagnes. Cette feuille pratique le culte de Papineau, dont on écrit le nom en gros caractères. On l’appelle Papineau tout court, il est sacré grand homme de son vivant. Quand il a parlé on s’incline sans discuter. Gare à ceux qui osent l’attaquer, Lemaître dirige sur eux son nid de guêpes. L’agresseur, le temps de le dire, est piqué de partout à la fois. Les « On dit », les « parce que »