Page:Côté - Papineau, son influence sur la pensée canadienne, 1924.djvu/112

Cette page a été validée par deux contributeurs.
97
La littérature de l’époque

viendrez, Messieurs, que la plus grande partie se sont renfermés dans une sphère bien étroite et ce n’est pas faute de bonne disposition ou de bonne volonté d’acquérir des connaissances, mais "faute d’occasions". »

Dans un pays où les ours viennent boire dans les encriers, un homme se met en frais de lancer un journal, mû par la seule ambition de dégrossir une population ignorante, car il n’y a rien à attendre au point de vue des intérêts financiers d’une population pauvre et qui ne sait pas lire. Il embrasse la cause des Canadiens-français, ainsi que son collaborateur Valentin Joutard. Le journal à peine paru, ils sont tous les deux arrêtés et font de la prison. Leurs noms apparaissent les premiers sur le martyrologue du journalisme canadien, auxquels s’ajouteront ceux de Bédard, de Lemaître, de Barthe, d’Asselin, de Fournier.

Voici des titres à notre reconnaissance, il nous semble. M. Roy se moque des intentions généreuses de Fleury-Mesplet à notre égard : « Comme tous ceux qui créent quelque chose, dit M. Roy, Fleury-Mesplet était convaincu qu’il comblait une lacune ; il se plaisait même à grossir l’importance de son œuvre. » Avoir une bibliothèque, un journal, est un détail infime dans l’existence d’un peuple, pourtant le Christ a dit : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de vérité. » S’il faut rendre hommage à celui qui traça la première voie dans les forêts vierges, comment pourrait-on ignorer le nom du pionnier de la parole imprimée, qui fixa dans une matière fragile, mais dont la longévité surpasse encore celle des hommes, les paroles et les actions remarquables des artisans de notre destin. Nous ferons remarquer en passant que l’érudition historique qui n’a pour but que de diminuer et d’amoindrir les bienfaiteurs de notre race n’a pas sa raison d’être. On se demande si le jeu en vaut la chandelle ? Est-ce que la charité chrétienne ne s’étend pas à la réputation de nos morts ? M. L’abbé Roy a-t-il bien fait d’écrire ces lignes : « L’esprit français était malheureusement représenté par des hommes à (?) réputation louche, par ces demi-lettrés, par ces épaves de la morale que