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la terre ancestrale

coucha, mais le sommeil le fuyait ; les réflexions lui venaient trop nombreuses à l’esprit.

« Dans quel cercle suis-je tombé, se disait-il ; quelle bande de voyous, quel avilissement ! En prison !… Moi qui croyais que seuls les véritables scélérats allaient dans ce lieu. Et dire que mes copains se glorifient de leur coup ; dire qu’ils sont prêts à recommencer ! Eh bien, moi, non ! Heureusement, la population n’est pas uniquement composée de gens de ce calibre. Je sortirai de ce sale milieu ; je me ferai d’autres amis ou je resterai seul ; je suis déjà descendu assez bas. Ils sont fiers d’eux et moi je n’ai pas eu le courage de leur cracher mon mépris à la face. J’ai été lâche parce que je me voyais à leur niveau. « Être Québécois par ces moyens ! Oui, Québécois, mais dans la lie ».

En ce moment arrivait Morin. Rioux l’entendit et alla le trouver ;

— Malchanceux, hein mon gars ? lui dit Morin.

— Oui, plus que toi, tu t’en es bien tiré.

— Me pensais-tu assez bête pour me laisser coffrer ? s’excusa Delphis. J’ai pris le large.

— Il paraît que tu nous en as joué une bonne, que tu as fait venir les gendarmes.

— Es-tu fou ? J’ai appelé les hommes de police, parce que, moins nombreux, nous allions recevoir une tripotée.