Page:Côté - La Terre ancestrale, 1933.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.
75
la terre ancestrale

nants. Dans ce cas, Québec ne serait qu’un purgatoire.

— Tu ne me parais pas aimer beaucoup la ville. Si tu désires t’enterrer vivant, c’est bien facile : retourne à la campagne. Cependant, je te conseillerais d’attendre un peu, d’étudier la vie de citadin : quand tu la connaîtras, tu ne voudras jamais l’abandonner.

— J’aime la ville mais non la pension. Pour retourner chez nous, jamais de ma vie. Je souffrirai plusieurs fois de la faim avant de me résigner à une telle humiliation. D’autant plus que, d’après les propres paroles du père, puisque j’ai quitté la maison, elle m’est fermée à tout jamais.

— Il faudra pourtant bien que tu ailles y chercher ta Jeanne, si tu veux l’épouser.

Hubert feignit l’indifférence :

— Elle n’est pas la seule fille au monde. Depuis que je vois celles qui se promènent sur les rues, je constate que celles de chez nous feraient piètre mine auprès d’elles.

Delphis eut peine à cacher un tressaillement de satisfaction. Habitué à la fréquentation de filles légères, il connaissait mieux la valeur d’une femme sérieuse et irréprochable. Croyant Hubert déjà plus faible dans son amour, il profita de ses dispositions :

— Mon vieux, il me vient une superbe idée : Allons veiller chez des gens que je connais : une vraie maison où