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LA TERRE ANCESTRALE

il est revenu de la ville depuis quelques jours. Il ne s’en vante pas, mais il paraît qu’il y a du chômage ; et ça m’a tout l’air qu’il vient hiverner chez ses parents.

— Comment se fait-il qu’il soit dans la voiture de Pierre ? questionna Jean Rioux.

— Parce qu’il s’est offert, leur apprit Adèle ; je l’ai entendu à la porte de l’église qui s’invitait à réveillonner chez eux : c’était difficile de le mettre à la porte.

— Tonnerre ! s’exclama le vieux Rioux, ça gaspille tout ce que ça gagne ; puis, quand arrive la morte saison, ça vient manger le pain de son vieux père. C’est plutôt lui qui devrait nourrir le vieux. Au moins, s’il aidait aux travaux, mais je serais bien surpris qu’il s’occupât même à soigner les bêtes. Tonnerre ! il a le toupet d’arriver ici comme un prince ; il se croit maître partout. Il est chanceux que Michaud ne soit pas Jean Rioux ; il apprendrait où un fils doit aller réveillonner à la Minuit.

Hubert n’avait rien dit, mais son joyeux entrain l’avait quitté. Personne, à part peut-être Adèle n’en devinait la cause. Loin de blâmer, lui, l’audace de Morin, il aurait voulu la posséder. « Ah, pensait le garçon, comme la ville vous enlève bien la timidité ». Il ne voyait pas qu’à Morin, c’est l’effronterie qu’elle donnait. Il se disait aussi que Delphis ne devait pas manquer d’ouvrage, qu’il