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la terre ancestrale

Le jeune homme fut abasourdi par cette lettre. Il avait beaucoup aimé son père, malgré sa sévérité, car, Jean Rioux, quoique ne concédant rien dans le commandement, s’était toujours montré tendre pour les siens. D’abord inquiet, se sentant coupable, Hubert se chercha ensuite des excuses, des raisons d’espérer. Après tout, le père était malade d’avoir trop travaillé. Si le fils était resté à la maison, peut-être serait-il encore robuste et sain. Mais aussi, quel entêtement de se cramponner à cette terre, quand il pouvait vivre de ses rentes en la vendant. Jean Rioux, quand il était jeune, avait choisi l’état qu’il aimait en prenant celui de cultivateur ; pourquoi lui, Hubert, ne serait-il pas libre de suivre sa voie. Le père était-il réellement aussi mal que le disait Adèle ? Comme le vieux n’avait jamais ressenti la moindre indisposition, on s’effrayait sans doute outre mesure à la première alerte. Cependant une pleurésie ne pardonnait pas souvent. Descendre !… Adèle en parlait à son aise, mais il fallait de l’argent pour le voyage ; or, Hubert devait même de la pension. À part cela, quel accueil lui ferait son père ? Il le croyait capable de le mettre à la porte à son arrivée. S’il avait eu l’argent nécessaire et s’il n’avait pas négligé sa lettre, il aurait bien pu prendre le rapide de nuit, mais à cette heure, il ne fallait pas y songer. Hubert Rioux, tout en réfléchissant ainsi, ne pouvait