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la terre ancestrale

— Peut-être, mais le voyage coûte toujours quelque chose. J’aurais bien pu lui prêter de l’argent, mais en donner sans savoir s’il nous sera rendu, on se corrige de cela. J’en ai déjà bien perdu en le prêtant à des amis.

— Pourtant, opina l’un des garçons, Hubert était bien honnête, par ici.

— Je ne veux pas dire qu’il soit voleur ; seulement, s’il emprunte sans pouvoir payer, bien fou qui se laisse prendre.

— D’après ce que je vois, songea tout haut le père, le pauvre garçon aurait mieux fait de demeurer chez lui. Mais, dis-moi donc, Delphis, comment se fait-il que tu ramasses tant d’argent, pendant qu’un si grand nombre ne font que vivoter ?

— Voici le grand secret, monsieur Michaud : se tenir à l’affût des occasions et ne pas les manquer.

— Oui, le secret doit être grand, et il n’est pas divulgué à bien des gens.

— Moi je dis, énonça la mère, qu’à la ville, les pauvres le sont par leur faute.

La vieille femme, à son habitude, parlait comme une linotte ; frappée uniquement par ce qui éblouit, elle n’allait jamais au fond des choses. Son époux, doué d’un meilleur jugement, et ne voulant pas laisser ses garçons subir l’in-