ALLELUIA
durée éphémère des royautés ! Le hareng saur et la
morue sont détrônés par le Bœuf gras ! Les étaux
des bouchers ressemblent à des châsses : des guirlandes
de fleurs en papier, des plantes et de la verdurette décorent
les murs et les vitrines. On dirait une réminiscence des
fêtes antiques en l’honneur du Bœuf Apis. L’agneau
pascal, de droit, devrait être élevé sur le pavois. Mais il
ravit peu de suffrages, sa chair rosée aux tendresses de
bouton est trop mièvre ! Enveloppée d’une coiffe de graisse,
blanche comme une béguine, sa délicatesse mystique
tente peu les lèvres rouges des gourmands. C’est le bon
boudin, c’est la gourgane, c’est le lard, c’est le jambonneau
qu’il faut à tous ces affamés après une si longue
abstinence ! Les beurres fondent leur gamme d’or, en
même temps que la symphonie des fromages chante les
splendeurs vernales, dirait un chroniqueur décadent.
Dans l’alignement des cages de volailles d’où la paille