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LE FORGERON DE THALHEIM

Instinctivement elle hésitait. Mais, au bout d’un moment.

— Eh bien ! je vous attendrai, dit-elle à demi-voix, tout émue en pensant à son père.

Elle se leva, Otto Stramm en fit autant, et après avoir pressé les mains de la jeune fille, il partit, joyeux et fier comme s’il eût conquis la Toison-d’or.

Elle retomba sur le banc, tremblante, frileuse sous le grand soleil du mois d’août et le regarda, un trouble mystérieux emplissant son cœur de dix-huit ans. La haute taille du forestier se découpait nettement sur le rideau de feuillage des arbres qui fermaient, pour ainsi dire, l’horizon, étroit. Et, quand il eut disparu à ses yeux, elle pensa longuement à cette affection qui venait d’éclore dans son existence solitaire. L’aimait-elle ? Elle n’en savait rien encore, l’affolement qui l’avait saisie l’empêchant de se rendre compte de ses propres impressions.

Pendant qu’elle rêvait ainsi, devant la maisonnette, le soleil dessinait sur le gazon les grosses ombres noires des pommiers moussus. Et, dans ces rayons de lumière, papillonnaient des insectes, aux ailes mordorées, nombreux