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vous descendez sur le Doubs ? demanda la charmante enfant.

— Mais, oui, mademoiselle Yvonnette.

— Et moi, je ne sors jamais d’ici. Une seule fois, j’ai été à Charquemont, lorsque j’ai fait ma première communion. Est-ce vrai que le monde est’ si grand et si beau ? Ah ! que je voudrais aussi le voir ! Rarement il vient quelqu’un chez nous. Et si j’essaie de questionner les gens qui passent dans la vallée, ou on ne me répond pas ou les parents m’envoient dans ma chambre. Dites-moi, vous, si le monde est beau et grand ?

— Beau ? Hum ! Je ne puis guère satisfaire votre curiosité. Je demeure là-haut, sur la montagne, et je n’ai non plus jamais quitté ma pauvre mère, laquelle a été enterrée il y a peu de jours. Pour grand, oh ! sûrement le monde est grand ! Après ce pays, il y a encore un pays, ensuite un autre pays, puis d’autres pays, toujours ainsi, bien loin, bien loin, avec des villages et de grandes villes, où il y a beaucoup de gens qui vivent les uns à côté des autres et où l’on voit de belles choses et des palais superbes.

— Ah ! que je serais heureuse d’aller dans ce monde ! On est à l’étroit dans ce coin, en-