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celle de son mari. Ils étaient mariés depuis quelques mois.

Jean Gaudat, natif des Franches-Montagnes, avait fait construire cette bicoque avant son mariage, d’abord parce que cela lui plaisait de s’établir là, ensuite parce qu’il comptait bien s’y livrer impunément à toutes sortes de vilains métiers. Mais, au moment où, à la suite de Pierre, nous entrons dans sa demeure, il craignait de s’être trompé : la Révolution semblait prendre des proportions que l’on n’avait pas soupçonnées. Il est vrai que l’agitation des campagnes, qui commençaient à se remuer, ne l’effrayait point, étant, de par sa nature, l’un de ces hommes qui aiment à pêcher en eau trouble. Et, certain de réussir un jour, de ramasser des écus, en attendant l’occasion ardemment souhaitée il braconnait dans le Doubs et dans les forêts, patient comme le chat qui guette la souris, bien résolu à ne pas reculer quand l’heure d’agir serait là. Roi dans la vallée, où les gardes du Prince n’auraient pas osé s’aventurer, il n’entretenait aucune relation avec le moulin, dont le tic-tac, aussi calme que l’existence de la famille qui en était propriétaire, le laissait parfaitement indifférent. On se sa-