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vivre sa vérité 1912–1914

eeiDieu n’existe pas ; il domine toute existence, et l’idée qu’il peut devenir réalité au lieu de rester éternellement esprit conduit aux idolâtries multiples. Dieu n’est pas dans ce bois doré, pas dans ce drapeau ; il n’est pas dans ces institutions démocratiques ou monarchiques ; il n’est pas non plus, suprême erreur, dans tel commandement moral. (Ils ont adoré ces règles morales.)

Dieu, c’est une volonté d’harmonie.

eeiLe frère de tous, du moindre grain de poussière ; — regarde la manière dont les fumées, dont personne ne s’occupe puisqu’il n’y a plus d’argent à en tirer, se déroulent dans l’air, fumées qui roulez et vous perdez ; — le frère de celui qui est fatigué de boire du whisky et de se tramer d’un ennui à l’autre ; le frère des morceaux de papier et des débris de verre qui s’ennuient dans les cours, en automne, au pied d’un lilas écorché qui n’a jamais de fleurs et presque point de feuilles ; et des torchons qui pendent aux cuisines.

Il faut garder son âme propre pour rester le frère de toutes ces choses et s’arranger avec elles quand la réconciliation sera venue.

Il faut se supporter les uns les autres et arriver enfin, cahin-caha, — comme des coolies qui ont trop bu de saké et qui s’avancent en se maintenant par collisions réciproques au milieu du chemin, — jusqu’à la porte illustre du royaume des cieux.

eeiCe qui est au fond du cœur de la plupart des hommes, c’est le plus souvent une peine, un regret, un deuil ; et c’est là la grande insulte à l’éternel. Cela prouve qu’ils sont fermés, qu’ils ne communiquent pas avec lui, car s’ils communiquaient, ce qu’on trouverait au fond, ce serait l’éternel lui-même, c’est-à-dire la joie.

Ils ont vraiment enterré, et à jamais, ceux qu’ils aimaient, dans leur cœur, au lieu de les laisser ressusciter, et de ressusciter avec eux dans l’éternel.