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la multiplication générale de ce type-là serait ce qui peut arriver de mieux aux gens de ce pays.

Le ministre a très nettement et pratiquement pris connaissance de nos buts et de nos difficultés. Avec MM. Scott et Kemp, ils se sont entretenus pendant une demi-heure avec les paysans. L’« honorable ministre » — c’est le titre admis — a assez sérieusement « remonté la pendule » de ces paysans en leur expliquant qu’il fallait qu’ils se donnent quelque peine pour s’aider eux-mêmes. Il s’est fait expliquer directement la nature de l’opposition des zamindars. C’est en fait quelque chose de vague. Le zamindar, espèce de seigneur terrien, uniquement là pour toucher des revenus sans contre-prestation sociale analogue à celle du seigneur médiéval de la bonne époque, le zamindar a surtout peur de voir le « rayot » échapper à sa domination exclusive, s’émanciper ; il manifeste sa mauvaise humeur en grognant ; il déclare par exemple que si on le mécontente, il ne prêtera plus d’argent. Le paysan se dit très justement que nous autres Européens ne serons là qu’un temps, et qu’ensuite il restera face à face avec son « patron » pour se débrouiller. L’idée qu’il peut aller se plaindre au collecteur à Muzzafarpur, si on lui fait tort, ne le réconforte qu’insuffisamment, et là encore il a raison. Il est lié, soumis, dépendant ; sa vie est déjà infiniment malcommode, sans qu’il ait à faire encore des réclamations à quinze kilomètres de son village.

Ces gens ne se tireront d’affaire que le jour où ils apprendront à collaborer. Ils n’ont besoin d’assassiner personne. Nous devons de tout notre effort les aider dans l’organisation de cette collaboration de tous avec tous et pour tous.

Chemin long, ardu, vers une toute petite lueur dans la nuit noire.

… Étrange qu’au beau milieu de ce qui nous paraît, depuis