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Dans les lettres du 27 février et du 19 mars, P. C. raconte en détail le début des nouveaux travaux. Il relate les longs entretiens avec les paysans pour les amener à accepter de bâtir, pour le futur village, non de misérables huttes de bambous, mais de véritables maisons d’« adobé » (avec parois de terre) plus solides, moins inconfortables, qui seront groupées le long de la digue, principale « artère », ou le long d’autres avenues ; il décrit la distribution des terrains aux premiers paysans décidés à déménager, l’organisation des hommes en équipes de dix qui éléveront, pied à pied et simultanément, les dix maisons nécessaires à leurs familles…


19 mars.

… J’étais poursuivi ces jours par cette idée de la difficulté qu’ont les hommes d’accepter, pour le service d’un idéal librement suivi, des conditions qu’ils ne trouvent nullement trop dures lorsqu’il s’agit des petits arrangements personnels et égoïstes de tous les jours. Je me rappelais qu’il y avait à ce sujet quelque chose de très fort, de presque scandaleux dans le Nouveau Testament, mais je ne savais ni quoi, ni où. J’y pensais encore au moment où je songeais aussi à envoyer un mot par télégramme à nos amis du Service civil réunis à Berne le 17 mars. J’ai feuilleté mon Nouveau Testament sans grand espoir de trouver ce que je cherchais. J’ai parcouru d’abord les épîtres, pensant qu’il s’agissait d’instructions données à quelques Éphésiens ou Romains. Puis l’impression nette m’est venue : « Non, c’est une de ces paroles mordantes, — dont le sens littéral paraît révoltant —, prononcées par Jésus lui-même, et je suis tombé presqu’immédiatement sur le passage de Luc 17 : 6-10.

« Si vous aviez la foi gros comme un grain de moutarde, vous diriez à ce sycomore : déracine-toi et plante-toi dans la mer, et il vous obéirait Quand votre serviteur rentre des champs, après le labour ou le pâturage, lequel de vous lui dira : viens vite te mettre