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ristophane, à mépriser la fausse vertu et le faux génie des heureux de ce monde et à sourire des sots, des méchants, des hypocrites. Ce cabaret est une grande et belle école de morale. Les poètes charmants du Chat-Noir professent l’ironie et la pitié, qui de toutes les vertus humaines sont, à y bien regarder, les seules innocentes et les seules exquises. Ils ne respectent point les ministres et les sénateurs ; mais ils respectent les pauvres, et ils sont socialistes sans violence et sans haine. M. Byvanck a trop d’esprit pour ne pas se plaire au Chat-Noir. Le Mirliton, plus rude et plus âpre, l’a charmé. Le Mirliton est ce café du boulevard Rochechouart où l’on entend Aristide Bruant, le chansonnier qui le premier exprima le pathétique de la crapule. Ce chantre terrible des filles, des souteneurs et des voleurs a émerveillé le philologue d’Hilversum, comme il a depuis étonné M. Oscar Wilde, qui fait profession de ne s’étonner de rien.

C’est aussi qu’Aristide Bruant a su donner à sa poésie et à sa personne un caractère soutenu, une physionomie originale et se composer tout entier corps et âme, en grand style canaille, avec une perfection qu’atteignirent seuls avant lui quelques cyniques grecs et, mieux que tout autre, ce Dio-