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de ses premiers malheurs ; il fut délivré de ces rêves maudits qui nous rappellent, sous un aspect sinistre, nos premières années, jusqu’à ce que l’œil troublé se rouvre humecté de pleurs.

135. Le jeune Juan dormit donc sans rêver ; — mais la jeune fille qui avait disposé ses coussins ne put se tenir, en quittant la grotte, de jeter sur lui un dernier regard. Un instant elle s’arrêta, puis revint sur ses pas, croyant qu’il l’avait rappelée. Juan était assoupi ; cependant elle pensa, ou du moins elle dit (le cœur échappe comme la langue ou la plume), que Juan avait prononcé son nom. — Elle oubliait que Juan ne le connaissait pas encore.

136. Rêveuse, elle regagna la maison de son père, en recommandant le silence le plus absolu à Zoé qui, d’une ou de deux années plus sage, devinait mieux qu’elle ses véritables sentimens. Un ou deux ans forment un siècle quand on sait les employer, et Zoé les avait passés, comme la plupart des femmes, à acquérir toutes ces utiles connaissances que l’on reçoit dans le bon vieux collége de la nature.

137. Le matin reparut, et trouva Juan dormant encore dans la grotte, sans que rien eût troublé son repos. Le murmure d’une source voisine, et les rayons naissans d’un soleil retenu à l’extérieur, ne le fatiguaient pas ; il put sommeiller à son aise. Il faut avouer qu’il en avait bien besoin, car nul n’avait été plus exposé ; ses souffrances étaient comparables