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98. Alors quelques-uns fondirent en larmes ; d’autres, regardant stupidement, ne pouvaient pas encore séparer leurs espérances de leurs craintes et semblaient n’avoir rien vu de nouveau. Un autre priait (la première fois depuis longues années), et trois autres étaient tranquilles au fond de la barque. On les remua par la main et par la tête afin de les éveiller, mais on les trouva morts.

99. La veille ils avaient aperçu une tortue, de l’espèce des becs-à-faucon[1], endormie sur les eaux, et en avançant doucement ils s’en étaient emparés. Elle leur sauva une journée de vie, et nourrit encore mieux leurs esprits en leur inspirant un nouveau courage. Dans un si grand péril ils ne croyaient pas que le hasard seul leur envoyât ce moyen de salut.

100. La terre leur offrait une côte élevée et rocailleuse, et les montagnes grandissaient à mesure qu’entraînés par un courant ils s’avançaient vers elles. Ils se perdaient dans une infinité de conjectures ; car telle avait été l’inconstance des vents qui les avaient ballottés qu’ils ne pouvaient décider dans quelle partie de la terre ils se trouvaient. Les uns croyaient voir le mont Etna, d’autres les montagnes de Candie, de Chypre, de Rhodes, ou bien quelques autres îles.

101. Cependant le courant et une brise naissante poussaient directement vers ce rivage salutaire

  1. Hawks-bill ; c’est celle que Buffon et tous les naturalistes français désignent sous le nom de caret. M. A. P. traduit toujours turtle, de quelque espèce qu’elle soit, par tourterelle.