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étaient gras ! Quelques-uns, plus heureux que les autres, avaient perdu la mémoire ; les autres pensaient à une nouvelle dissection, comme s’ils n’avaient pas été assez éprouvés par la mort affreuse de ceux qui avaient assouvi leur faim de la même manière.

81. Bientôt ils songèrent au contre-maître comme le plus gras d’entre eux : mais indépendamment de ce qu’il avait peu d’entraînement à cette destinée, il fit valoir quelques autres indispositions. La première c’est qu’il sortait de maladie : mais ce qui lui donna gain de cause, fut un léger présent que, par voie de souscription générale, lui avaient fait les dames de Cadix.

82. Il restait encore quelque chose du pauvre Pédrillo, on en usa avec discrétion. — Quelques-uns s’en effrayaient, d’autres imposaient silence à leur appétit, ou n’en prenaient qu’une bouchée de tems en tems. Il n’y eut que Juan qui ne cessa de s’en abstenir, et se mit à mâcher un morceau de bambou ou un peu de plomb. Enfin ils attrapèrent deux boobis[1] et un noddi[2], qui les décida à abandonner le corps mort.

  1. Le nom que M. A. P. a traduit par celui de butor est plutôt une espèce d’oiseau de tempête, ou de pétrel. Le butor se tient ordinairement près des étangs, et jamais sur les mers.
  2. Le noddi est un animal assez semblable à l’hirondelle de mer. « Nous avons, dit Buffon, adopté le nom de noddi (sot), qui se lit fréquemment dans les relations des voyageurs anglais, parce qu’il exprime l’étourderie ou l’assurance folle avec laquelle cet oiseau vient se poser sur les mâts et sur les vergues des navires, et même sur la main que les matelots lui tendent. » (Hist. naturelle du Noddi.)