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77. À défaut d’autre profit, le chirurgien eut, pour salaire, le premier choix des morceaux. Mais comme il éprouvait alors une soif violente, il aima mieux boire une coupe du sang chaud qui jaillissait. Une partie du corps fut divisée, et une autre, telle que la cervelle et les entrailles, ayant été jetée à la mer, régala deux goulus qui escortaient la barque. Le reste du pauvre Pédrillo fut mangé par les gens de l’équipage.

78. Tous en mangèrent, à l’exception de trois ou quatre qui n’étaient pas si avides de chair humaine. Il faut y ajouter Juan, qui, ayant auparavant refusé sa part d’épagneul, ne ressentait pas à la vue de Pédrillo un appétit beaucoup plus vif. On ne devait pas s’attendre que dans la dernière détresse il pût jamais se joindre à eux pour dîner de son ancien maître et pasteur.

79. Il ne l’eût d’ailleurs pas fait impunément ; car les suites de ce repas furent bien funestes. Ceux qui l’avaient fait avec le plus de voracité tombèrent dans un délire de rage. — Dieu ! comme ils blasphémèrent ; ils se roulèrent couverts d’écume et en proie aux plus étranges convulsions ; ils avalèrent l’eau marine comme celle d’une fontaine limpide ; ils pleurèrent, grincèrent les dents, hurlèrent, jurèrent, mugirent ; enfin, avec un rire d’hyène ils expirèrent en désespérés.

80. Leur nombre fut bien aminci par cette affliction ; et, quant à ceux qui restèrent, Dieu sait s’ils