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il fit ce que tous vous voudriez faire : ses jeunes lèvres remercièrent la main par un reconnaissant baiser ; et aussitôt, confus de son ivresse, il la quitta avec l’air du désespoir, comme s’il eût commis un crime. Combien l’amour est timide la première fois ! Julia rougit, mais ne se courrouça pas : elle chercha à parler, mais elle retint sa langue, tant sa voix était affaiblie.

113. Le soleil disparaît, et la jaune Phœbé se lève[1] : mais, par malheur, le diable est dans la lune. Ceux qui ont donné à cet astre le surnom de Chaste l’avaient, je crois, observé de trop bonne heure. Les plus longs jours, même le 24 de juin, ne voient jamais autant d’actes licencieux que le bienveillant regard de la lune n’en éclaire en trois heures seulement, — et c’est ainsi que toute l’année elle atteste sa modestie[2] ?

114. Il y a du danger dans le silence de cette heure : c’est un calme qui permet à l’ame oppressée de se mettre à l’aise, sans lui donner la liberté d’appeler la conscience à son secours. La lumière argentée qui inonde cet arbre et cette tour, et les couvre

  1. Les traducteurs ont substitué l’épithète pâle à celle de jaune ; mais ce n’est pas par distraction que Byron, le plus grand poète descriptif qui ait jamais été, s’est servi ici de l’adjectif yellow. Ce sont les rayons de la lune qui sont pâles, et non pas elle.
  2. M. A. P. traduit : « Pourtant on admire son aspect modeste pendant qu’elle parcourt les cieux. » Byron veut dire ici que toutes les nuits éclairées par la lune sont aussi indécentes que les trois heures auxquelles il vient de comparer les plus longs jours.